ChroniCoeurs

vendredi 31 janvier 2014

En finir avec Eddy Bellegueule - Edouard Louis

EN FINIR AVEC EDDY BELLEGUEULE

auteur : Edouard Louis


Aujourd'hui, nous avons décidé de faire une chronique groupée, à trois. Oui car c'est un roman que nous pourrions qualifier de "Daniela"… On peut s'y mettre à trois. Oui, la référence est bâtarde mais à la hauteur du roman que nous avons lu.

Résumé éditeur :

"Je suis parti en courant, tout à coup. Juste le temps d'entendre ma mère dire Qu'est-ce qui fait le débile là ? Je ne voulais pas rester à leur côté, je refusais de partager ce moment avec eux. J'étais déjà loin, je n'appartenais plus à leur monde désormais, la lettre le disait. Je suis allé dans les champs et j'ai marché une bonne partie de la nuit, la fraîcheur du Nord, les chemins de terre, l'odeur de colza, très forte à ce moment de l'année. Toute la nuit fut consacrée à l'élaboration de ma nouvelle vie loin d'ici". En vérité, l'insurrection contre mes parents, contre la pauvreté, contre ma classe sociale, son racisme, sa violence, ses habitudes, n'a été que seconde. Car avant de m'insurger contre le monde de mon enfance, c'est le monde de mon enfance qui s'est insurgé contre moi. Très vite j'ai été pour ma famille et les autres une source de honte, et même de dégoût. Je n'ai pas eu d'autre choix que de prendre la fuite. Ce livre est une tentative pour comprendre.


Notre avis :

Une incompréhension totale. Quel est le véritable but de ce roman, ou plutôt de ce récit autobiographique ? En effet, la question se pose. Dès les premières lignes de ce livre, nous sommes happés dans un monde de violence. De la violence qui ne vient pas forcément des événements rapportés par Eddy, non elle est amenée par la narration de l'auteur. Ce dernier est incapable de reconnaître là où se trouvent les marques d'affections que ses parents lui prodiguent. Certes, sa vie n'était pas simple, vivre à sept avec 700 € ce n'est pas la panacée, mais il a survécu avec dégoût. 

Nous avons noté dans des avis sur cet ouvrage que l'auteur, malgré ses 21 ans, faisait preuve d'un recul sur sa vie… Eh bien, nous ne devons pas avoir le même regard. Il est bien trop jeune. Tout le récit ressort comme s'il s'agissait d'une crise d'adolescence. Des souvenirs jetés en pâture avec force et désordre. Aucun véritable enchaînement logique dans ce livre, l'auteur nous emporte d'un point D à un point E, en passant par le A, le W. Tout est prétexte ici à juger, à critiquer uniquement les autres, aucune remise en cause sur son comportement. Dès que le père ou la mère d'Eddy dit ou fait quelque chose qu'il n'apprécie pas, le narrateur va nous en servir pendant des paragraphes d'explications sur ce qu'il a ressenti et qu'il ressent toujours d'ailleurs pour nous amener sur une petite digression là encore très critique. Mais si ses parents font quelque chose de bien, ont un geste tendre, Eddy passe directement à autre chose de beaucoup moins charmant, peut-être est-il inapte à analyser ses propos. 

La vision des relations telle qu'il l'a décrite pour un de ses cousins est exactement la même pour lui, sauf qu'il n'en a profondément pas conscience : "Comme si les individus, les autres, étaient toujours associés à un lieu, un espace, un temps particuliers, dont il était impossible de les dissocier, comme s'il existait une géographie des liens, de l'amitié, et que la détestation des lieux entraînait, inexorablement, fatalement, la détestation de ceux qui s'y trouvent."

Il dénonce à juste titre les insultes, les crachats, les humiliations… qu’il a subis. Pourtant, il reproduit le même schéma sur les siens !
Il en est de même lorsque le narrateur dit, par le biais de sa mère, que son père a quitté la région pour aller dans le Sud, qu'à cette époque son meilleur ami était arabe, alors qu'au moment de la narration le père est raciste. Eddy Bellegueule ne cherche pas à comprendre, à découvrir ce qu'il s'est passé…non, pour lui son paternel a cherché à fuir, il est revenu, c'est un loser, un con. Il ne le dit pas directement, mais sa manière de tourner ses phrases le laisse deviner.

Il se plaint également qu'il n'y avait pas grand-chose à manger, alors parfois ils devaient se contenter des poissons que le paternel pêchait… ohhh oui, quelle misère de ne manger que du poisson, quelle honte, quelle infamie, il faut pendre les parents haut et court… (ah merde, nous ne sommes pas au XVIIIe siècle ?)

Venons-en au style d'écriture, rien de révolutionnaire, ni bon ni nul, juste le minimum syndical. Un roman / récit qui ne nous transporte pas, qui ne fait pas rêver (ce n'est pas le but). L'auteur reproduit en grande partie le langage parlé avec ses fautes, et fait ressortir le manque d'éducation. Mis à part cela, il s'agit simplement d'une description de faits avec un recul uniquement dans certains cas. Monsieur Louis revendique la distance d'un sociologue, alors depuis quand les sociologues imprègnent leurs écrits de la haine, du dégoût qu'ils ressentent ? S’il veut mettre ceci dans son écrit, très bien, mais il nous sert forcément un texte boiteux, pipé.

Au final, un livre larmoyant où le misérabilisme est omniprésent… D'où vient ce misérabilisme, certainement des rancoeurs que "l'adulescent" livre dans son récit. Le lecteur se retrouve à ingurgiter les aventures d'un Calimero qui s'ignore, accusant à chaque chapitre son homosexualité d'être à l'origine de son rejet.
En finir avec Eddy Bellegueule, ou comment donner envie aux lecteurs de baffer l'écrivain. Car face à cette succession de plaintes, nous avions envie de l'occire pour abréger, non pas ses souffrances, mais les nôtres. (Pitié !)

Satrape, Mika et Fred

En finir avec Eddy Bellegueule
Édouard Louis
Editions du Seuil
219 pages
17 €
9782021117707

7 commentaires:

  1. Merci pour votre avis.
    Pourquoi ne pas avoir écrit cette chronique avant que je n'achète cet ouvrage et par la même occasion que je perde 17 € et surtout du temps....
    Je suis effectivement déçue par ce torchon pourtant encensé par la critique.
    Je me pose plusieurs questions : Doit-on prendre cet ouvrage comme une plaisanterie ? L'auteur économise-t-il sur une thérapie en sortant ce... livre ?

    Marie-Anne de T.

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  2. Marie-Anne, le retour, ravi de vous revoir. Et désolé pour notre retard dans la publication de notre avis.
    J'ai également été déçu par ce livre, j'ai souhaité le lire justement à cause de tous les avis positifs que je découvrais sur les blogs, ou dans la presse. J'aurais mieux de m'abstenir...
    au plaisir de vous voir à nouveau

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  3. Chouette, enfin un avis négatif, chose rare sur le woueb.
    Faut dire ce qu'on pense, c'est bien !
    Et merci pour les économies !

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    1. Hey Fabe, eh oui que veux-tu... En cherchant on en trouve quelques uns quand même, certains plus mitigés que notre avis ici à la rédaction ;)
      à bientôt

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  4. Merci pour votre avis je retrouve bien mon sentiment d'après lecture de ce roman.. Je ne comprends pas l'éloge général.

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    1. Bonsoir, merci pour votre commentaire.
      Je ne comprends pas non plus, j'en viens à me demander sir les journalistes lisent réellement les ouvrages qu'on leur présente, restent-ils juste à la surface ?

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  5. d'accord avec vous livre choquant pas seulement par les faits rapportés mais par le manque d'analyse de l'auteur qui voit le mal partout, le bien nulle part et ne se remet pas en cause. Son enfance n' a pas été simple mais doit il pour autant pourrir celle de son frère et sa sœur âgés de 15 ans qui doivent vivre un cauchemard depuis la parution du livre, sans compter le reste de la famille. En fait l'auteur qui ne rêve que des milieux aisés ne supporte pas d'être né pauvre. Quel mépris pour les milieux populaire !

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